Naturopathie et Micronutrition

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Un article de Gille DONGUY. <Section Naturopathie fondamentale>

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Si la Naturopathie puise ses racines dans l’aube des temps, il n’en demeure pas moins que le Naturopathe moderne est très sollicité par les laboratoires de compléments alimentaires, dont certains sont très orientés micronutrition. Elle est aussi souvent éclipsée par la nutrition moderne et scientifique à outrance. Alors, la naturopathie de papa ne suffit-elle plus ?

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De quoi parle-t-on au juste ?

J’aurai pu intituler cet article « Naturopathie et Nutrition moderne », ou encore « Naturopathie et Nutraceutique », voire « Naturopathie et Nutrithérapie », et j’en passe ! Vous l’avez compris, il s’agit là de mettre en perspective les connaissances modernes en nutrition et micronutrition (avec leur cortège d’appellations selon qu’elle évoque des doses de micronutriments physiologiques ou pharmacologiques)  émanant de nombreuses publications scientifiques, par rapport aux assertions traditionnelles de la Naturopathie, dont une des techniques phares est justement l’alimentation version naturopathie : j’ai nommé la bromatologie.

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La bromatologie en Naturopathie

La bromatologie se divise en fait en deux approches interconnectées :

  • La diététique, autrement dit l’art des restrictions alimentaires au sens propre du terme : jeûne, diètes, monodiètes.
  • La nutrition, c’est-à-dire l’art de se nutrir sainement.

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Ces deux concepts sont largement expliqués dans un récent ouvrage de Grégoire Jauvais :

« Que manger pour être en bonne santé, mince et rester jeune ».

Il y a belle lurette que la Naturopathie a défini, avec quelques nuances selon les écoles, les règles d’une alimentation (nutrition) saine. Par exemple, selon Robert MASSON, qui a développé le concept d’Eutynotrophie, l’alimentation, que l’on soit omnivore ou tendance végétarienne,  doit être :

  • Naturelle
  • Frugale
  • Equilibrée
  • Individualisée
  • Digeste

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Ces concepts sont détaillés dans son livre « Diététique de l’expérience », mais aussi bien sûr dans ses enseignement au sein de son école, le CENA.

Côté compléments alimentaires, la Naturopathie privilégie les « super aliments » (algues, produits de la ruche, etc.) ou les compléments alimentaires issus d’ingrédients naturels, quelle que soit la forme galénique. Les compléments alimentaires constituent un vaste sujet, sur lequel nous reviendrons.

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La nutrition moderne et la micronutrition

De ce point de vue, on peut distinguer deux grandes chapelles :

  • La diététique officielle, dont le bras armé est en France le Plan National Nutrition Santé (PNNS, vous savez « Manger bouger », « 5 fruits et légumes par jour », …)
  • La Nutrition de pointe, nuancée en plusieurs sensibilités justifiant chacune leur point de vue sur la base de publications scientifiques, et quelque fois critiques sur le PNNS et certaines assertions nutritionnelles officielles.

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Il est un fait que parmi les nutritionnistes modernes, médecins ou spécialistes (cancérologie par exemple), les Dr COHEN, DELABOS, FRICKER, CURTAY, SEIGNALET, COUDRON ou WILLET n’ont parfois pas tout à fait le même discours sur tel ou tel aspect de la nutrition…et au-delà d’un large consensus sur de nombreuses thématiques, il existe donc quelques batailles d’expert  sur tel ou tel sujet, un des fers de lance étant le thème inépuisable de la minceur…

Les approches des nutritionnistes, surtout ces dernières années, ont en tout cas eu le grand mérite de remettre en cause un certain nombre d’impostures nutritionnelles ou métaboliques : le « méchant » cholestérol  et les « vilaines » graisses saturées ainsi suggérées  par la diététique officielle en sont des exemples  emblématiques, qui ne résistent pas aux  faits scientifiques. Idem pour les bons glucides complexes prônés à 50 % de la ration par le PNNS, mais plutôt à 40% pour les nutritionnistes avertis, comme je l’évoquais dans un précédent article

La nutrition s’occupe de définir les grandes règles de l’alimentation santé (dont un modèle archétypale est le régime crétois), la micronutrition s’occupent de combler les éventuels carences en toutes sortes de micronutriments (vitamines, minéraux, antioxydants, composés phytochimiques, etc.), à doses physiologiques. En complément, d’autres approches étudient l’intérêt de micronutriments à fortes doses (dites pharmacologiques) pour traiter certaines pathologies.

Ces approches définissent aussi des valeurs d’ANC optimales, qui snobent souvent les ANC officiels : ainsi, savez-vous que le consensus pour la vitamine C, dans le milieu des nutritionnistes « raisonnables » est de 200 mg/jour au lieu des 110 mg consentis officiellement pour l’adulte ? Même chose avec la vitamine D, les chiffres officiels ayant souvent plusieurs trains de retard ! (200 UI officiellement, 800 UI au moins pour certains nutritionnistes…)

Alors, la Naturopathie est-elle dépassée par la science nutritionnelle moderne?

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Naturopathie versus Nutrition moderne

A ce stade, il faut bien comprendre les deux axiomes suivants :

  • La Naturopathie est une approche holistique (empirique dirons certains) de la santé. Comme le dit si bien Robert Masson, c’est une Médecine des profondeurs, restauratrice des Energies. Elle s’appuie notamment sur les 3 concepts de vitalisme, causalisme et humorisme (qui trouvent des échos dans bien des médecines traditionnelles, dont la MTC), et sur les 10 familles de techniques de soin. Elle s’appuie aussi néanmoins, dans la cadre de son évolution, sur les connaissances actualisées de la physiologie et biologie humaine.
  • La Nutrition moderne, même si les études épidémiologiques lui confèrent un certain statut « holistique », a résolument une approche « réductionniste » (au sens noble du terme !) : elle s’appuie sur les connaissances biochimiques et physiologiques extrêmement pointues issues de nombreuses publications scientifiques accessibles sur les PUBMED et autres SCIENCE DIRECTE…

Plutôt qu’un long discours, je résume dans le tableau ci-dessous, quelques éléments de comparaison entre ces deux approches :

 

Nutrition moderne – Micronutrition Naturopathie – Bromatologie
Approche réductionniste et statistique Approche holistique
Notions d’inflammation de bas grade, d’acidose métabolique. Notion de toxémie, d’encrassage humoral. Equilibre acido-basique aussi.
Basée sur les publications scientifiques Basée sur l’observation, les connaissances traditionnelles et « empiriques », tout en prenant en compte l’évolution des connaissances et des techniques.
Implique un diagnostic médical en amont Suppose un bilan vital en amont, en complément du diagnostic médical
Les compléments alimentaires sont souvent des cocktails de minéraux, vitamines, etc. plus ou moins synthétiques…ou naturels! Privilégie les compléments alimentaires à base d’ingrédients naturels.

Bien entendu, des passerelles peuvent être jetées entre les deux approches, qui peuvent se compléter utilement.

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Un exemple synergique : les graisses animales

Selon la naturopathie, l’alimentation doit être la plus naturelle possible. Bien sûr elle ne prône pas de consommer de la viande à outrance (mais n’est pas non plus dans la logique « No Steak », qui relève de courants à part, et bien des peuples à centenaires en consomment substantiellement !), mais pour autant, si l’on respecte le principe de naturalité, elle vous dira :

  • Manger si possible de la viande bio, issue d’élevages respectueux de l’animal.
  • Manger de la viande d’animaux nourris selon leur physiologie : bio ça suffit pas, encore faut-il que la vache mange de l’herbe et ne soit pas gavée de maïs et de soja fussent-ils bio, et encore moins bien sûr de farines animales !
  • Mettre en œuvre une cuisson respectueuse de l’aliment (exit le trop grillé, les micro-ondes, etc.)

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C’est du simple bon sens !

Que nous apprend la nutrition moderne à ce sujet ? Et bien effectivement, elle pointe sans détours l’ineptie de certains élevages, où la nourriture donnée aux animaux est anti-physiologique, notamment :

  • Résidus riches en acides gras Trans
  • Céréales riches en omégas 6 au détriment des omégas 3
  • Sans parler des antibiotiques et compagnie !

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Ainsi, de nombreuses publications on montré que le rapport omégas 6/omégas 3 des viandes ou des œufs issus de ces élevages arrive facilement à 20 voire 30 au lieu des 1 à 5 que l’on avait ne serait-ce qu’avant-guerre…

C’est d’ailleurs sur ce constat qu’est née la filière bleu-blanc-cœur !

 

Donc si vous manger de la viande de bœuf bio nourrie au maïs et soja bio, vous ferez sans doute de l’inflammation bio, et les maladies qui vont avec !

Non seulement cet excès d’omégas 6 favorise le terrain inflammatoire, mais de plus les acides gras trans qui vont de pairs augmentent sérieusement le risque de cancer, et de maladies cardio-vasculaires : au secours gentil cholestérol !

Les graisses cachées ne sont pas celles que l’on croit (ou qu’on veut nous faire croire officiellement), mais bien ces omégas 6 en excès et acides gras trans ravageurs : les tenants et aboutissants de cette problématique sont très bien expliqués dans l’ouvrage de Marcel ARICKX, « Cholestérol Non-coupable ! », évoqué dans la rubrique Flash’Livres.

Mais vous savez quoi ? Si l’on respecte les principes naturopathiques, et à conditions de disposer de toutes les informations utiles sur la traçabilité de nos aliments, pas besoin d’attendre les justificatifs scientifiques, ça marche quasiment aussi bien ! L’ennui de nos jours est que l’agrobusiness a tellement brouillé les cartes que pour trier le bon grain de l’ivraie, il faut un véritable travail d’expert !

Et c’est pourquoi le travail de recherche des nutritionnistes est capital!

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Un premier exemple antagoniste au « crédit » de la Naturopathie : les fruits

Robert Masson a fort bien dépatouillé la problématique des fruits pris en fin de repas, notamment des fruits acides et aqueux qu’il vaudrait mieux prendre en dehors des repas (la diététique Chinoise va dans le même sens!), et ne pas consommer trop pour certaines constitutions… ! Bien des naturopathes ont amélioré l’état de certains de leurs patients avec cette simple mesure (mais on accepte aussi en Naturopathie l’idée que certaines constitutions les tolèrent parfaitement, même en fin de repas !). Je n’entre pas ici dans le détail du pourquoi et du comment (plus tard sans doute !)

Mais toujours est-il que si vous interrogez un nutritionniste sur le sujet, il vous dira sans doute avec un air amusé et en toute bonne foi que cela n’a aucune importance !

J’ai tendance à penser que la plupart des nutritionnistes, penchés à raison et en toute légitimité  sur les détails micro nutritionnels, finissent par privilégier le raisonnement « substances » (les vitamines et fibres des fruits) considèrent comme négligeable ou non avenu, sur ce sujet précis d’autre impératifs de l’alimentation, comme la bonne digestibilité d’un repas en fonction de la constitution de l’individu…Peut-être ont-ils raison, face aux assertions de Naturopathes basées essentiellement sur la clinique et l’expérience. Mais au terme d’un premier coup d’œil  sur les ressources de publications scientifiques, je dois dire que je n’ai pas trouvé à ce jour d’articles traitant explicitement de ce sujet : si il est parmi vous un lecteur qui a des références solides sur ce sujet, je suis naturellement preneur!

Il y a en effet deux questions complémentaires à se poser :

  • Existe-t-il des études scientifiques qui montrent clairement que l’ingestion de fruits acides et aqueux en fin de repas (agrumes, pomme poires, etc.) n’a aucun impact sur la bonne digestibilité du repas, quelque soit la constitution du mangeur?
  • Existe-t-il des études scientifiques qui montrent clairement l’inverse?

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Un deuxième exemple antagoniste au « crédit » de la Nutrition moderne : L’équilibre acidobasique

Cette notion d’équilibre acidobasique a été popularisée par le Dr KOUSMINE, puis développée par Christopher VASEY, voir son ouvrage « Gérez votre équilibre acidobasique : une vision complète »

Il faut dire que la Naturopathie s’est littéralement accaparé cette approche, initialement inconnue (ou peu) à l’époque ou  Marchesseau à structuré la discipline, les concepts de toxémie et toxilymphémie faisant fort bien l’affaire.  Et on a donc vu la plupart des écoles de Naturopathie prôner le fameux papier pH pour tester ses urines et en déduire si l’on est acidifié ou non (voir alcalinisé !).

J’avoue que j’ai toujours été un peu réticent avec cette pratique qui ne m’a jamais semblée fiable, et souvent source de confusions (magistralement clarifiées il faut le dire par Christopher VASEY dans un de ses articles).

Les nutritionnistes se sont emparés du sujet et parlent d’acidose métabolique latente, concept au carrefour des notions d’inflammation de bas grade et de stress oxydant. Au risque d’en décevoir certains parmi vous, les dernières publications scientifiques montrent clairement que le test du pH urinaire pour définir l’état acidobasique est illusoire ou pour le moins imprécis, le pH des urines subissant de grandes variations en fonctions de multiples facteurs. En lieu et place, pour ceux qui tienne absolument à avoir un test concret, il existe un test de laboratoire plus fiable : l’Excrétion Urinaire Nette acide. Par ailleurs, les nutritionnistes ont défini une mesure de référence du potentiel acidifiant ou alcalinisant des aliments, le PRAL.

Soyons pragmatiques : le bilan vital pratiqué par le Naturopathe est  largement suffisant pour définir la tendance à l’acidose tissulaire ou non de l’organisme, et on peut même se passer  de cette notion acide-base en raisonnant tout simplement toxémie, notion qui est d’ailleurs fort bien décortiquées par les connaissances biochimiques modernes !

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Divers projecteurs, mais garder un vue d’ensemble !

Je souhaite en profiter ici, pour insister sur le fait que de nombreuses notions apparues ces dernières années en nutrition (et reprises avec plus ou moins de bonheur par diverses instances naturopathiques), tel l’équilibre acido-basique, les index et charge glycémiques, le stress oxydatif, les omégas 3 et ainsi de suite, sont certes très intéressantes et pertinentes, mais elles sont un coup de projecteur sous un angle particulier propre à chacune : il ne faut pas perdre de vue l’ensemble !

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Illustration tirée du livre « Acouphènes : un vécu, des solutions »

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En effet, les assertions des unes peuvent entrer en contradiction avec les assertions des autres. Exemple : la pomme de terre est alcalinisante, et riche en potassium, chouette ! Mais son index et charge glycémiques pour le moins élevés viennent quelque peu tempérer cet enthousiasme initial, sans parler de la présence de saponines potentiellement toxiques.

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Finalement une histoire de Yin et de Yang

Petite incursion dans les concepts de l’Énergétique Chinoise. Si l’on y réfléchi bien, on peut considérer les choses sous un angle d’équilibre entre les deux approches (Naturopathie et Nutrition moderne). En énergétique, le YIN ancre le YANG, le YANG dynamise le YIN. S’il  n’y a pas assez de YIN, le YANG risque de s’échapper, de « partir en live » comme on dit. D’un autre côté, si le YANG est faible, il ne dynamise pas assez le YIN qui peut alors stagner !

L’exemple typique de ce point de vue en énergétique est celui du lien entre Sang et Energie.

Et bien admettons que :

  • La Naturopathie est une approche « YIN » : elle s’ancre dans l’observation, l’empirisme et le pragmatisme, mais évolue aussi au gré des connaissances nouvelles
  • La Nutrition moderne est plutôt une approche « YANG », très dynamique, en témoigne les nombreuses publications scientifiques qui y sont consacrées, mais parfois contradictoires ou biaisées…

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Approche réductionniste : un pâle aperçu du métabolisme du glucose…

Gageons que ces deux approches constituent l’une pour l’autre un garde-fou : la Naturopathie permet de rester ancrée dans une vision holistique de la santé, évitant de se noyer dans les détails infinis de la biochimie, tandis que la nutrition moderne – que tout bon naturopathe se doit d’étudier à mon sens! – vient préciser, confirmer (ou parfois infirmer) les acquis anciens, la conduisant ainsi à évoluer. C’est l’image du ballon de baudruche que l’on retient de la main…

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Gilles Donguy

 

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